27.9.11

Je ne suis plus déserteur

J’leu fait, je suis toujours vivant et je ne traine pas de boulet au pied ! J’ai réintégré le 21e de ligne aujourd’hui. Je manquais à l’appel depuis le mois de février. Vous le savez certainement, les déserteurs risquaient dans l’ordre de gravité : la mort, le boulet – marcher avec un boulet de calibre huit attaché par une chaine à la jambe gauche, vous pouvez essayer ce n’est guère commode – et dans tous les cas, une amende.

Mais il semble bien que j’ai été accueilli à bras ouverts. Et pourtant, aucune amnistie n’avait été décrétée en ce mois de septembre 1811.
La seule explication : les rumeurs qui font tant parler dans les
chambrées d’une campagne qui pourrait conduire l’armée en Russie…

La seule conséquence pour moi de ma désertion, elle est inscrite sur le registre du régiment : le changement de mon matricule. J’avais le numéro 5559, je suis désormais le 5085 ! Vous pouvez le noter.

Je me demande bien ce qu’est devenu le gars qui portait ce numéro là auparavant. En tout cas moi j’ai arrosé ça avec mes camarades retrouvés puisque j’ai été réincorporé dans le même 2e bataillon.


23.9.11

J’imagine votre impatience de passer à la 2ème leçon de l’Instruction du Soldat. Mais il me faut d’abord vous poser une question que je pourrais m’amuser à hurler comme un adjudans : combien parmi vous, bande de nig'doules, ne savent pas distinguer leur droite de leur gauche ?
Tous ?
Et je les inviterais à ôter leurs chaussures… et à y placer de la paille dans celle qui chausse le pied droit…non pas celle-ci, celle-là, et du foin dans celle du pied gauche et en avant marche : paille-foin, paille-foin, paille-foin…une méthode éternelle même s parfois je m’interroge : est-ce que dans deux cents ans vous saurez encore distinguer la paille du foin ?

13.9.11

D’accord, d’accord, je vais vous raconter toutes mes batailles, mais si je ne commence pas par les commencements, vous n’allez pas tout saisir. Vous devez donc subir au moins les premières leçons de la formation du soldat.

Le règlement de 1791 fera l’affaire, de la position sans arme aux changements de direction.

Et je vous conseille de vous habituer aux ordres criés «d’une étendue de voix proportionnée au nombre de recrues qu’on exercera» autrement dit «au nombre de recrues à dresser».

Les recrues c’est vous. Moi je joue le rôle de l’adjudant-major. Décidément l’armée me manque.

Donc je vous laisse vous installer. La première leçon est consacrée à la position du soldat :


-Vous devez «mettre vos talons sur la même ligne»;
- Ils doivent «être rapprochés autant que possible». Parce qu’on ne peut pas demander à des hommes aux genoux cagneux de les joindre complètement.
- Les pieds doivent être «un peu moins ouverts que l'équerre, et tournés en dehors». Car s’ils sont trop tournés, quand vous allez devoir porter le haut du corps en avant, vous allez vous casser le nez.
- Les genoux eux doivent être « tendus sans les roidir » ;
- Le corps « d'aplomb sur les hanches » ;
- Le « haut du corps doit être penché en avant » ; je vous avais prévenu. Le contraire a de grands inconvéniens dans la marche ;
- Les épaules effacées et non pas les épaules en avant et le dos voûté des hommes de la campagne…Vous êtes des soldats sacrebleu.